Regard(s) sur la profession

De nombreux rapports institutionnels et gouvernementaux mettent en cause la légitimité du monopole notarial ou les manquements disciplinaires. Ces rapports ne sont pas portés à la connaissance du Grand Public. Pourtant, ils nous éclairent sur des problématiques récurrentes auxquelles sont confrontés chaque années des centaines voir des milliers de français.

Ci-dessous une liste non exhaustive de ces rapports.

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Rapport de l’Inspection Générale des Finances / Rapport de l’Inspection Générale de la Justice / Rapport du Médiateur du Notariat / ASSEMBLÉE NATIONALE: Mission « flash »

Rapport de l’Inspection Générale des Finances sur les professions réglementées, mars 2013

Couverture du rapport de l'Inspection Générale des Finances à propos du notariat.
Source de l’extrait du rapport
(Tome 2 > Annexe II > Chapitre 2.2.3 > Pages 9-10):
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Le rapport nous dit:

« S’agissant de l’acte de mutation, il faut distinguer sa rédaction, réalisée aujourd’hui au sein des études par les clercs, de sa relecture et de son authentification réalisée par le notaire. La force probante particulière de l’acte n’est attachée qu’à ce que le notaire a en personne accompli et à ce qui s’est passé en sa présence, c’est‐à‐dire la date de l’acte, la présence des parties, leur signature et le contenu de leur accord, mais pas au fait que ce soit le notaire qui ait rédigé l’acte ».

« Par conséquent, la rédaction d’un acte soumis à publicité foncière et l’authentification de cet acte en vue de sa publication à la conservation des hypothèques sont deux tâches différentes, qui n’ont pas nécessairement à être accomplies par le même professionnel. Si la protection de l’ordre public juridique justifie que les notaires bénéficient d’un monopole sur l’authentification de l’acte, la mission considère en revanche qu’aucun motif d’intérêt général n’exige que la rédaction de l’acte entre dans le périmètre d’activités réservées des notaires, et qu’il serait plus efficace d’un point de vue économique que cette tâche ne soit pas réservée aux notaires, qui sont par ailleurs en nombre insuffisant ».


Rapport de l’Inspection Générale de la Justice, octobre 2020

Source des extraits du rapport: lien externe

Le rapport de l’IGJ pointe du doigt de nombreux dysfonctionnements, tant des notaires eux-mêmes que des parquets, pour sanctionner les brebis galeuses.

Extraits du rapport:

Pages 3-4,

« Il en est de même des inspections qui, faute d’une analyse très poussée par les parquets, viennent insuffisamment alimenter le champ disciplinaire. Ce mode de traitement est d’autant plus contestable qu’il reste cantonné au sein de chaque profession, à l’abri de tout regard extérieur, alimentant la critique de l’entre-soi qui resurgit régulièrement« .

« L’importance de ce traitement infra disciplinaire explique certainement la faiblesse du nombre de sanctions prononcées annuellement et ce quelle que soit la source statistique. D’emblée, il faut tout d’abord insister sur la pauvreté du système d’information. Aucune profession n’est en mesure de fournir des données vérifiées et consolidées. Cela vaut également pour la direction des affaires civiles et du sceau et, localement pour les autorités judiciaires. Cette difficulté à connaître et donc à restituer symbolise bien un domaine que les professionnels peinent à dévoiler jusqu’ici, se contentant à tout le moins d’une opacité certaine« .

Plus loin, page 19,

« La première des obligations professionnelles énoncée par le règlement déontologique des notaires est ainsi celle de s’attacher à donner la meilleure image de sa profession. Ainsi la mise en cause de l’honorabilité est souvent visée dans les rapports irrespectueux du professionnel avec ses confrères et les magistrats, l’honneur de la profession, défendu par les instances professionnelles, devant avant toute chose être préservé. La discipline, sanction d’un comportement contraire à la déontologie, est même quelque peu éludée afin de ne pas nuire à l’image de la profession« .

Page 53,

« Le constat a été fait par la mission d’une exploitation et d’une analyse insuffisantes par les acteurs concernés des rapports de contrôle. Les instances nationales professionnelles se privent d’une connaissance exhaustive des pratiques professionnelles, de leurs points faibles, des manquements les plus fréquemment identifiés ».
« Le différentiel existant entre le nombre de contrôles opérés et le faible nombre de procédures disciplinaires, peut laisser place à des interprétations multiples. Il pourrait signifier des instances vigilantes dans l’exercice du contrôle, mais à l’inverse, laisser supposer un entre soi installé (Les notaires ont été ouvertement exposés à cette critique lors de la mission d’évaluation de la loi CAECE qui a fait état d’un contrôle par les pairs, exercé dans les chambres régionales ou départementales, ne garantissant pas un respect suffisant des obligations déontologiques)« .

« De son côté, l’autorité judiciaire a pour mission d’exercer la surveillance des professions, notamment au travers des rapports de contrôles et d’inspections dont les parquets sont rendus destinataires.
Or, la mission a sur ce point constaté des pratiques et initiatives localement très différentes, assez peu institutionnalisées et peu structurées et qui sont le plus souvent fonction de l’appétence personnelle des magistrats en charge des professions réglementées« .

Page 54,

« Par ailleurs, certains magistrats du parquet n’hésitent pas à exprimer leur difficulté à lire et exploiter tous ces rapports, affirmant ne pas savoir quelles suites leur donner« .

« Ils [les procureurs] font aussi état d’un manque de compétence et de formation pour décrypter des données techniques, comptables de professions dont ils connaissent mal le contexte et les pratiques et ainsi ne pas être à même de percevoir la gravité de certains écarts« .


Rapport annuel du Médiateur du Notariat, édition 2019

Source des extraits du rapport: lien externe

Le rapport évoque en page 13:

« 56% des demandes ne peuvent prospérer du fait du refus du notaire de participer au processus de médiation (28%) ou du défaut de réponse de la part du notaire à la demande réitérée par le Médiateur de savoir s’il accepte ou non de participer à ce processus (28%)« .

Pages 20-21,

« Si ces retards ne sont pas explicables, ils procèdent d’une mauvaise organisation de l’étude, des modalités de contrôle du travail des collaborateurs, et révèlent une attitude désinvolte à l’égard des clients.

« À ces retards dans l’exécution de la mission du notaire, il convient d’ajouter les défauts de réponses aux clients ce qui est encore plus mal ressenti par la clientèle qui se plaint alors d’être méprisée, d’être abandonnée. Les défauts de réponse sont inexcusables« .

Lorsqu’au défaut de réponse du notaire vient s’ajouter celui, heureusement très rare, de la Chambre des notaires, le client ne sait plus vers qui se tourner alors, en outre, que la saisine du Médiateur est généralement irrecevable. Il se sent pris dans un piège d’une profession invulnérable, intouchable et dont les membres n’auraient pas de comptes à rendre« .

Dans ce domaine de l’attention et de la correction que doit avoir le professionnel à l’égard de son client, un nombre avéré de saisines est motivé par le manque d’empathie que ressentent, à tort ou à raison, certains clients de la part du notaire ou du collaborateur en charge du dossier.

« On va se payer ma tête combien de temps, ces gens-là se croient tout permis et au-dessus des lois« .

POINT DE VIGILANCE

L’Observatoire constate que le site internet du médiateur du notariat ne propose pas d’accès facilité aux différents rapports annuels. C’est dommageable car un tel accès permettrait aux usagers et aux médias d’analyser l’évolution comportementale des membres de la profession.

NB: il faut aller chercher les rapports annuels dans une rubrique peu explicite « Qui est le médiateur?« .


ASSEMBLÉE NATIONALE: Mission « flash » sur la mise en place d’un collège de déontologie des officiers publics ministériels, octobre 2020

Source des extraits de la mission: lien externe

Le rapport mission évoque 10 propositions pour améliorer la confiance du public et la qualité du service rendu par les notaires:

Diffuser la culture de la déontologie

Proposition n° 1

Créer un collège de déontologie pour chacune des professions d’officiers publics et ministériels chargé, d’élaborer des règles, de les diffuser, et de répondre aux interrogations des professionnels.

Proposition n° 2

Mieux informer les usagers des obligations des officiers publics et ministériels, ainsi que l’existence des différentes voies de recours (chambre, procureur, médiateur).

Limiter l’entre soi

Proposition n° 3

Nommer des personnes extérieures (magistrats judiciaires et administratifs, universitaires, autres officiers publics et ministériels) dans les collèges de déontologie, les instances disciplinaires et les chambres nationales et locales.

Proposition n° 4

Confier la présidence des collèges de déontologie et des chambres disciplinaires à des personnes extérieures.

Proposition n° 5

Faire remonter le contentieux disciplinaire au niveau des chambres nationales.

Proposition n° 6

Mettre en place un formulaire de plainte en ligne et un dispositif de filtre et de suivi de leur traitement.

Proposition n° 7

Rappeler dans la loi l’obligation pour chacune des professions d’officiers publics et ministériels de désigner un médiateur et préciser ses missions.

Réaffirmer des principes cardinaux

Proposition n° 8

Revoir l’échelle des sanctions pour les rendre plus dissuasives et confier un pouvoir d’injonction aux présidents de chambre.

Proposition n° 9

Exiger que le notaire fournisse un récépissé à la réception de toute demande d’acte faisant appel à ses prérogatives de puissance publique et émette un procès-verbal d’empêchement en cas de difficulté justifiant un retard dans sa démarche.

Proposition n° 10

Fixer dans la loi un socle de principes déontologiques communs aux différentes professions.


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