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Dans son Bulletin de liaison « La Bastoche » (n°263) du 21 mars 2025, la Fédération CGT des sociétés d’études n’y va pas par quatre chemins pour évoquer auprès du président du Conseil Supérieur du Notariat (CSN) les difficultés rencontrées par les salariés du notariat. « Manque de gestion prévisionnelle des emplois », absence d’entretiens annuels et de formations, « manque de management et de communication », sans oublier les inquiétudes sur la pérennité du régime de retraite qui ont été les principaux griefs exprimés par les syndicalistes.
« Nous avons beaucoup de témoignages de salarié.es qui subissent du harcèlement et des pressions et nous constatons des arrêts maladie plus fréquents et plus longs, ce qui impacte le régime frais de santé et de prévoyance ».
Après une période de suractivité et une augmentation des effectifs post-Covid, la branche, habituée à subir les fluctuations du marché en fonction des crises, doit désormais faire face à une baisse significative de son chiffre d’affaires depuis fin 2023 qui, à l’évidence, provoque quelques tensions internes. En réalité, ce qui place sans cesse le notariat en difficulté, c’est qu’il possède un monopole pour une mission de service public. Par définition, elle est non soumise à des questions de rendements et de bénéfices, alors même que les notaires sont des professionnels libéraux qui doivent générer des marges et des bénéfices.
La CGT alerte aussi sur une vague de licenciements frappant durement la profession notariale, avec des chiffres alarmants : 18% des rédacteurs d’actes, 17% des assistants rédacteurs, 14% des clercs et 11% des notaires salariés sont concernés. Le syndicat dénonce un manque de gestion prévisionnelle des emplois, soulignant le paradoxe d’une profession qui forme ses salariés avant de les licencier. « C’est un réel gâchis » pour les syndicalistes.
D’autres sujets ont été portés à la connaissance du président Bertrand SAVOURÉ, notamment le désintérêt croissant des employeurs pour la formation professionnelle de leurs salariés, avec seulement 12.000 salariés formés en 2024 contre 30.000 en 2009, et les inquiétudes du syndicat quant à l’avenir du régime CRPCEN (Caisse de Retraite et de Prévoyance des Clercs et Employés de Notaires) compte tenu de la réforme des retraites voulue par Emmanuel MACRON.
Il est ainsi vraiment regrettable qu’aucun média ni aucun journaliste d’investigation ne se questionne davantage sur les pratiques internes à la profession.
Ainsi, une notaire m’a contacté il y a quelques mois via le site de l’Observatoire Indépendant du Notariat en France (OINF.fr) :
« Je suis notaire associée depuis 10 ans et me fais violemment évincer de mon étude par le Président de Chambre des notaires.
J’ai découvert que mon nouvel associé avait reçu une succession testamentaire au profit des enfants de mon ancien associé…il y en a une deuxième en cours. Beaucoup d’autres consœurs vivent le même scénario. Nous nous faisons voler nos études par des Confrères membres de nos instances…
Les violences économiques faites aux femmes dans le notariat se multiplient et sont cachées. On nous asphyxie financièrement pour ne pas agir en justice. On nous intimide. On nous brutalise.
Je suis en train de recenser les multiples cas et serais heureuse de vous en parler. Il est grand temps de dénoncer cette Mafia notariale ».
Les termes employés témoignent d’une réelle souffrance, y compris au sein même de la profession.
Dans son Bulletin de liaison n°262 du 10 mars 2025, « La Bastoche » évoquait déjà des « actes de répression et d’intimidation de certains notaires » causés par les difficultés économiques et le ralentissement de l’activité.
Le syndicat aborde le cas d’une employée d’une étude notariale située dans le Nord qui a été confrontée à une situation inadmissible : les deux notaires de l’étude lui ont demandé oralement de signer une mise à pied disciplinaire et de quitter les lieux sans préavis, avec l’appui de la police. La victime, rédactrice d’actes depuis trois ans, travaillait dans des conditions difficiles en raison du départ de plusieurs collègues non remplacés, ce qui a entraîné une surcharge de travail et un début de burn-out. Malgré ses alertes, elle n’a reçu aucune aide de ses employeurs.
La Fédération des sociétés d’études semble impuissante face aux conditions de travail difficiles de nombreux employés du secteur, qui vivent dans la peur constante d’être licenciés ou contraints de signer une rupture conventionnelle. Les méthodes employées par les notaires, qui ont fait appel à la force publique pour intimider leur employée, sont jugées indignes de leur profession et contraires aux règles de déontologie. La victime, soutenue par un syndicat, a décidé de porter plainte et sera accompagnée par un conseiller du salarié et un avocat.
Dans ce milieu où le silence est roi, et où les victimes d’erreurs notariales sont si souvent ignorées, un journaliste comme Victor CASTANET pourrait être le seul espoir de faire éclater la vérité.
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